Les souvenirs remontent à la surface comme des iules
Dans le sud, parfois, il peut pleuvoir violemment, bruyamment et si le vent s'en mêle, on change de pays, ce n'est plus celui des plages et des cigales mais celui des montages et des ciels violents. Et puis, souvent, la pluie s'arrête brusquement, on s'étonne presque de cette fin brutale et le soleil revient comme si de rien n'était. Mais, sur la terrasse de la maison et même à l'intérieur, il s'est passé un drôle de phénomène: des petits vers noirs sont apparus de nulle part et se trainent lamentablement, comme s'ils se demandaient ce qu'ils font là, comme s'ils cherchaient une porte de sortie. Ce sont les iules ou mille-pattes ronds qui, après le déluge, cherchent refuge dans des endroits secs. Et je ne sais pas pourquoi, ce n'est pas très poétique pourtant, ils m'ont fait penser aux souvenirs qui remontent à la surface sans prévenir, souvent après la pluie qui crée un choc dans l'espace-temps, et ils cherchent eux aussi une porte de sortie pour s'exprimer. J'en ai même fait un poème, puis je me suis dit : quand même comparer un souvenir à un myriapode, c'est une drôle d'idée. Mais en fait ça se défend: un souvenir aussi est à mille pattes, on ne sait jamais par où le prendre: parfois il n'évoque rien de formel, il peut être incolore ou parfois, au contraire, il fait apparaître immédiatement un lieu ou un visage, bien reconnaissables mais qui se transforment, changent de tête ou de paysage tout en racontant la même histoire. Et puis le souvenir est souvent triste mais je ne sais pas si on peut dire "triste comme un iule". Alors j'ai pensé que si le souvenir était triste après la pluie, c'est parce qu'il croyait à des larmes. Mais faire le parallèle entre les pleurs et la pluie, ce n'est pas vraiment nouveau non plus !
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